Présentation
In this panel, we invite contributions that explore nostalgia of ethnographers about no longer accessible fieldworks due to multiple crisis contexts, such as, for instance, in the Saharan and Sahelian region. Nostalgia invites us to reflect on our understanding of the experience of temporality in our anthropological practices and scientific career. We are looking for contributors with reflexive attitudes grounded in empirical experience who will engage with their own research processes, while also interrogating the assumptions and relations of power embedded in the politics of knowledge production. Here are some of the questions that could be addressed. How to engage with the interrelated dimensions of security, methodological, epistemological and ethical challenges of conducting research when ‘crisis’ become the ‘new’ normal on your field? What impact does the inaccessibility of the field have on early-career researchers? What are the transformative and prefigurative aspects of nostalgia for the future of anthropology and social sciences in general?
Coordination : Marie Deridder & Amalia Dragani
Est-ce de la nostalgie ? possibilités, pouvoirs et pièges d’un récit à la première personne de l’éclatement de la guerre à Khartoum en avril 2023
Luisa Arango
En 2018, j'ai fait des rêves récurrents de Khartoum, la ville que j'avais quittée en 2012 après avoir terminé ma thèse doctorale. Ces rêves évoquaient la nostalgie d'une époque passée. Cependant, en 2023, lors de mon évacuation de Khartoum pendant des bombardements, cette image idyllique s'est transformée, soulevant des questions sur la légitimité de raconter mes souvenirs. En tant que femme non européenne et universitaire, je dois naviguer des dynamiques de pouvoir complexes. Mon récit peut-il être réflexif sans tomber dans le piège du sentimentalisme ou de l’héroïsation ? Je veux utiliser une approche auto ethnographique pour comprendre mon expérience à Khartoum entre 2021 et 2023, tout en évitant le piège d'un récit trop personnel qui pourrait fausser l'analyse anthropologique.
Les vertus du regard détourné ? Contre l'idée du paradis perdu, l'interdiction d'accès à un terrain comme opportunité pour penser le politique… et les idéologies du primitivisme et de la nostalgie.
Marion Langumier
Un collectif d'anthropologues (Langumier et alii, 2023) critique les "mauvaises raisons" de la nostalgie chez les chercheurs blancs sur des terrains lointains, notamment l'ethnocentrisme et les projections idéalisées. Ces auteurs soulignent aussi la valeur des récits critiques dans des contextes de crise ou de transition.Une contribution au livre détaille des recherches au sud-ouest de l'Éthiopie, abordant la surveillance politique liée aux mégaprojets dans la vallée du fleuve Omo. L'impossibilité de travailler dans les basses terres a poussé la chercheuse à se concentrer sur la ville voisine, révélant des dynamiques interculturelles entre les habitants, les étrangers et les populations d'éleveurs marginalisées. Ce changement de perspective remet en question la nostalgie et l'idéalisation des éleveurs par les touristes occidentaux, tout en dévoilant la stigmatisation par les autorités éthiopiennes, montrant que des contraintes peuvent parfois mener à des découvertes plus profondes.
L’ethnographie à l’épreuve. Insécurités et manières de faire l’enquête dans le LiptakoGourma nigérien
Hamani Oumarou
En contexte d'insécurité, les enquêtes qualitatives exigent des adaptations, souvent résumées par l'expression "C'est le terrain qui commande". Cette communication examine les tactiques concrètes nécessaires pour mener des recherches ethnographiques dans des situations instables, avec des exemples
tirés du Liptako-Gourma, une région transfrontalière au Sahel marquée par l'insécurité. S'inspirant du concept de "tactiques" de De Certeau, l'auteur analyse comment les chercheurs ajustent leurs méthodes tout en maintenant la rigueur de l'enquête. Les adaptations sont des "variations d'usages" qui reflètent la nature variable des terrains d'enquête, souvent liés à des questions éthiques. Les défis de la recherche en zone d'insécurité peuvent induire des réponses émotionnelles et soulever des dilemmes éthiques, influençant ce qui est révélé ou dissimulé lors de la production du savoir.
Échanges, partage et nostalgie : les « ressentis » autour du retour digital sur le terrain Bissa au Burkina Faso, via le fonds photographique et des albums
Armelle Faure
Cette communication explore les notions de "ressenti" et de "nostalgie" à travers des échanges entre le Burkina Faso et la France concernant un fonds photographique. L'auteur, qui a vécu de nombreuses années au Burkina Faso, a digitalisé près de 700 photos prises entre 1982 et 1996 dans la région Bissa. Le
réseau formé pour documenter ces images a permis de contacter des personnes qui y apparaissent, certains devenus des figures historiques, des chefs respectés, des maires ou des dirigeants d'associations. Le contexte actuel de guerre au Sahel complique les déplacements et crée un climat d'incertitude, tandis que la "politique Afrique" en France semble floue. Cependant, ces échanges rappellent les années de la révolution du Président Sankara. Le "ressenti" autour de ces photos diffère entre les deux pays, soulignant la complexité des relations culturelles et politiques entre la France et le Burkina Faso