Présentation
Ce panel invite des contributions originales sur l’état actuel des outils et méthodes de recherche mobilisés dans les travaux sur l’Afrique. Nous souhaitons ouvrir un espace de discussion qui s’inscrit dans une perspective réflexive à partir de différents terrains et contextes de recherche. Dans cette perspective, le panel propose de réunir des travaux sur les conditions matérielles de la recherche et sur les effets de ces dernières sur la production académique des chercheur.e.s. Cependant, il ne s’agit pas ici de relancer le débat sur la division du travail scientifique dont le caractère inégalitaire entre le Nord et le Sud a été largement démontré (Diawara, 1985 ; Hountondji, 1993 ; Ouattara et Ridde 2013 ; Zevounou, 2020 ; Beaud, 2021). Les contributions questionneront plutôt l’épistémologie de la recherche dans sa dimension de déconstruction, de reconstruction et de « révision » des preuves en sciences sociales (Passeron, 2004) sur l’Afrique. Nous serons particulièrement attentifs aux présentations restituant des terrains « concrets », c’est-à-dire des pratiques de recherche et des modes opératoires, qui, parce qu’ils ne sont pas explicitement formulés dans la méthodologie officielle, relèvent de pratiques réelles (Becker, 2002). Les propositions de communication pourront également aborder les difficultés de prise de distance vis-à-vis des catégories (émiques, normatives, institutionnelles) tout en analysant leurs effets sur les savoirs produits. Par ailleurs, ce panel accorde une place prépondérante à la dimension diachronique des recherches puisqu’il engage les chercheurs à questionner leurs pratiques au regard des héritages coloniaux afin d’étudier les ruptures et continuités qui s’opèrent avec certains modes opératoires.
Sans prétention à l’exhaustivité, les questions suivantes fournissent quelques indications sur les orientations thématiques des contributions attendues :
- Quelle place accorde-t-on à la réflexivité dans nos recherches ? Comment les chercheurs (Africains et non-Africains) travaillant sur les terrains africains résistent- ils, ou au contraire, mobilisent-ils les assignations émanant du terrain ? L’enjeu est d’essayer de comprendre la place assignée au chercheur par les acteurs étudiés et inversement.
- Comment les chercheurs déjouent-ils les barrières et proximités linguistiques, ethniques, nationales, sociales, de sexe ou de race ? Autrement formulé, quels sont les atouts et les limites d’une « anthropologie chez soi » (Diawara, 1985 ; Ouattara, 2004). Quid d’une anthropologie sur autrui ?
- Quels savoirs académiques, grilles d’analyse et cadres conceptuels mobilise-t-on pour travailler sur l’Afrique ? Dans quelles mesures les théories, concepts et méthodologies appliquées sont-elles opérantes ? Et le sont-elles plus ou moins par rapport à d’autres terrains ?
- Comment s’organise la production de savoirs dans des contextes de crise (politique, sécuritaire, sanitaire) ?
Coordination : Sadio Soukouna et Niandou Touré
Communications
Marion Langumier
Analyser en anthropologue le rôle social des anthropologues étrangers sur un terrain sud-éthiopien : résistances, expérimentations méthodologiques et éthiques de la réflexivité
Philippe Lavigne Delville
Démêler l’écheveau des politiques publiques. Retours sur une pratique de recherche sur les réformes foncières (Bénin, Sénégal)
Véronique Petit
Enquêter sur la santé mentale au Sénégal : déconstruire sa position locale pour entrer dans l’analyse de la santé mentale globale
Serigne Momar Sarr
Le sujet de la réflexivité : vers un plan perspectif pour un renouveau épistémique négro-africain ?
Charlotte Vampo
Tensions dans les études de genre sur/en Afrique Subsaharienne