Présentation
Coordination: Nzikou Mouelet Samarange Romel & Dias-Chiaruttini Ana
Nos ateliers interrogent les questions de la formation des enseignants dans toutes les disciplines au regard des enjeux actuels de l’éducation liés à l’impact du numérique, aux violences scolaires, à l’éducation en contexte de conflits armés, aux innovations pédagogiques, etc. La problématique soulevée permet de penser la formation des enseignants pour répondre aux défis de la qualité et aux enjeux sociétaux actuels dans un contexte d’insuffisance d’enseignants en nombre et en qualité. En nombre, parce que depuis les années 1980-1990 avec les politiques d’ajustement structurel (PAS), « les politiques de recrutement et de formation des enseignants à tous les niveaux ont été fortement soumises à de douloureuses hésitations entre réalisme économique et volonté politique de plus d’accès, plus de démocratie en matière d’éducation » (Altet et Ouedraogo, 2017). En qualité, parce que le recrutement de personnes souvent sans formations professionnelles pour faire face aux immenses besoins a pu causer tous les abus liés au clientélisme pour aider certaines catégories des populations à échapper « au dur sort de la rareté des emplois ». Combler les manquements ainsi causés par des choix politiques devient une urgence et la recherche en éducation apporte quelques pistes de réflexion et de solution. Ces ateliers constituent donc des espaces intéressants d’échange et de partage d’expérience entre chercheurs travaillant sur les questions de la formation et des pratiques enseignantes dans divers contextes de l’Afrique subsaharienne. Ils mettent en lumière des résultats des travaux de recherche en lien avec les dispositifs de formation et d’ingénieries pédagogiques, les usages du numérique dans le développement professionnel des enseignants, la formation des enseignants face aux défis d’inclusion, de violence scolaire et d’expression identitaire.
La formation des formateurs dans l’enseignement primaire en contexte d’insécurité de Boko-Haram au Nord Cameroun
Gnebora Oumarou
Face à la montée des attaques de Boko-Haram dans les établissements scolaires dans la pointe septentrionale du Cameroun, les autorités éducatives ont adopté une politique axée sur la réforme de la formation du corps enseignants. Le présent travail étudie les modes de formation des enseignants initiés par les pouvoirs publics et les autorités éducatives en particulier pour faire face à la prolifération des violences de Boko-Haram dans les établissements scolaires. À partir de la démarche empirique et de la logique inductive, il montre comment la multiplication des attaques constantes de Boko-Haram a restructuré et renouvelé l’offre de formation des enseignants au Nord-Cameroun et dans la région de l’Extrême-Nord Cameroun. Sur la base des enquêtes de terrain, de la consultation des archives administratives et éducatives, et des organisations internationales, l’étude met en lumière les composantes institutionnelles, pédagogiques de formation de personnel enseignants pour la prévention et la gestion des risques de violence de Boko-Haram dans les écoles et contre les élèves au Nord-Cameroun.
Comment penser à l’éducation à la citoyenneté en République du Congo dans un contexte ethniquement segmenté ?
Gabin Jucaël Ossoula
Cette recherche vise à décortiquer les liens entre les politiques éducatives (basées sur l’égalitarisme universel) mises en place dans la formation du citoyen en République du Congo et la dimension réelle marquée par des clivages ethniques. Nous avons interrogé les paradigmes de l'assimilationniste et du
multiculturalisme. Dans le premier les différences culturelles ne sont pas prises en compte et il s’agit d’un idéal d’égalitarisme universel. Dans le second, la reconnaissance de cette diversité culturelle et la liberté d’expression de celle-ci dans l’espace public sont une priorité politique. Nous interrogeons ensuite
l’interculturel, qui au lieu de se focaliser sur la reconnaissance des différences culturelles, priorise les interactions entre les groupes d’individus et transforme la pluralité des appartenances socio-culturelles en un élément constitutif du sens du « Nous ». Cette réflexion se propose de comprendre comment promouvoir un idéal du « Nous » au moyen de l’égalitarisme universel d’inspiration républicaine dans un contexte scolaire et social hautement segmenté d’un point de vue ethnique ?
Analyse des facteurs limitatifs de l’accès des enfants sénégalais en situation de handicap à l’école : cas de l'école élémentaire publique Pikine 23/B de l'Inspection de l'éducation et de la Formation (IEF) de Guédiawaye
Ba El Hadji Mouhamadou Fadilou Diallo & Mamadou Moustapha Ndao
Cette étude a pour objectif d’analyser les facteurs limitatifs de l’accès des enfants sénégalais en situation de handicap à l’école. A cet effet, nous avons essayé de voir si les représentations socioculturelles des acteurs intervenant au niveau de l’école élémentaire publique Pikine 23/B, établissement
d’expérimentation de la méthode inclusive au niveau de l'Inspection de l'éducation et de la Formation de Guédiawaye, retenue comme notre cadre d’étude, et les approches pédagogiques qui y sont développées favorisent l’accès des élèves en situation de handicap. Pour atteindre cet objectif, une méthodologie suivant l’approche mixte a été utilisée afin de prendre en compte les aspects qualitatifs et quantitatifs liés à l’éducation inclusive au niveau de l’école Pikine23/B. C’est ainsi qu’un effectif de 113 élèves en situation de handicap représentant l’ensemble des élèves en situation de handicap au niveau de l’école Pikine23/B de l’IEF de Guédiawaye a été enquêté à l’aide d’un questionnaire comme instrument de collecte de données. A côté des élèves, nous nous sommes entretenu avec un certain nombre d’acteurs comme le chef de l’établissement et les enseignants à l’aide d’un guide d’entretien. A terme, les résultats obtenus montrent des améliorations notables en ce qui concerne l’acceptabilité des élèves en situation de handicap de la part des parties prenantes de l’école Pikine 23/B et des efforts sont notés à propos des compétences pédagogique du corps administratif comme du corps enseignant dans la prise en charge des enfants en situation de handicap, visuel surtout. Toutefois, des résistances sont encore notées surtout chez certains de leurs camarades élèves, auteurs de harcèlement sur leurs camarades élèves en situation de handicap et chez les enseignants qui manquent, encore, de formation pour la prise en charge des élèves en situation de handicap autre que visuel.
Le phénomène de décrochage scolaire chez les adolescents au Congo : trajectoires scolaires et processus de déscolarisation
Matsimouna Nada Krishna
Ma communication est portée sur le décrochage scolaire chez les adolescents au Congo et les trajectoires du décrochage. Cette étude a pour objectif d’identifier les causes du décrochage scolaire au Congo. Le décrochage scolaire est multifactoriel qui interpelle plusieurs sociologues de l’éducation (Yves-
Bernard, 2010) dans les pays de l’OCDE et ceux de l’Afrique. Pour mener cette étude, nous nous sommes appuyés sur le modèle psychosocial et écologique de Bronfenbrenner (1979) qui s’appuie sur l’environnement de l’enfant. Les entretiens individuels ont été mené à Brazzaville auprès de 30 adolescents
à travers les récits de vie des enquêtés. Nos résultats préliminaires confirment le caractère multifactoriel du décrochage scolaire. En somme, les facteurs du décrochage scolaire appartiennent au même registre que ceux identifiés dans les pays de l’OCDE et d’Afrique, cependant les facteurs familiaux et économiques semblent plus déterminants.
Les contenus de la formation initiale des enseignants du secondaire au Cameroun : enseignements fondements ou formation professionnelle ?(1961-2018)
Ntemfack Sedric Darlyl
Ce travail analyse l’évolution du degré de dosage entre contenus théoriques et pratiques dans la formation des enseignants du secondaire au Cameroun. L’objectif est de déterminer les fondements des quotas ainsi établis, et l’incidence que la répartition de ces contenus a sur la qualité de formation de ces enseignants au Cameroun. Dans une perspective historique, nous nous sommes appuyés sur des textes d’archives ayant organisé la formation des enseignants dans les ENS du Cameroun. Nous les avons exploités concomitamment avec les rapports de l’UNESCO sur la formation des enseignants au Cameroun, ceux des différentes inspections pédagogiques et des témoignages recueillis auprès de chefs d’établissements et d’enseignants en poste ou retraités. Il apparaît que le temps consacré à la pratique dans la formation pédagogique a progressivement perdu le dessus face à la durée dédiée à la formation académique. Depuis l’avènement de la première école normale du Cameroun à Yaoundé en 1961, la période du stage pédagogique dans les lycées et collèges a régressé passant, d’un an à moins de trois mois. La mauvaise qualité du recrutement des élèves professeurs dans certaines filières impose aussi aux formateurs de multiplier les heures de cours académiques de base. Ces formateurs et les contenus qu’ils enseignent ne sont pas toujours arrimés aux réalités de l’enseignement secondaire. Tout ceci rend les élèves professeurs moins aptes à l’exercice du métier d’enseigner, dès leur sortie de l’école. Nous suggérons entre autres de rehausser les diplômes d’admission dans les cycles des ENS du Cameroun, et passer à une formation en alternance durant tout le cycle de formation, et non plus seulement sur une courte durée comme aujourd’hui.