Présentation
Coordination: Aly Tandian & Jean-Luc Primon
En tournant résolument le dos aux récits stigmatisants qui voient dans les migrations internationales une menace pour la sécurité des pays de transit et de destination et ne cessent de mobiliser des discours répressifs incitant à un contrôle et une gestion des frontières qui accompagnent la montée de sentiments xénophobes et de replis souverainistes et identitaires, cet atelier vise à favoriser une compréhension structurelle des migrations en considérant les sociétés contemporaines d’ici et d’ailleurs comme des sociétés de migrations devant composer avec un monde en mouvement et de nouvelles connaissances pouvant nourrir la gouvernance des frontières. Dans cette optique, nous mettrons l'accent sur les témoignages et récits de vie des migrants et les transferts immatériels pour réinterroger les discours dominants sur les migrations à la fois dans la sphère publique des pays de départ, de transit et de destination. Toujours dans la perspective de repenser les migrations, l’atelier fera également une place aux nouvelles méthodologies qui cherchent à combiner les compétences des migrants, des citoyens et des acteurs associatifs ou étatiques
Capturer la circulation des savoirs : Intérêt de l'approche biographique pour l'étude des migrations climatiques
Cécile Artigaud
Les changements environnementaux et climatiques jouent un rôle dans la migration, mais la plupart des études en font une cause déterminante, négligeant d'autres facteurs comme les aspects sociaux, économiques et politiques. Ces visions simplifiées nourrissent des discours alarmistes prédisant des flux massifs de migrants vers l'Europe. L'approche biographique, qui examine les récits de vie, offre une perspective plus nuancée. Elle montre comment les individus et les communautés s'adaptent aux défis environnementaux avant de migrer, révélant des stratégies d'adaptation et de résilience. Cette approche permet également de comprendre le rôle des savoirs traditionnels dans les décisions migratoires et leur circulation dans les zones d'accueil. Une étude menée au Ghana avec des agriculteurs burkinabés illustre ces dynamiques.
Tisser des liens et dépasser les frontières : témoignages intimes de jeunes de Dakar
Aboubacar Sadikh Ba
Le domaine de recherche sur les migrations à travers les récits s'est concentré sur l'importance des témoignages intimes pour créer des liens et renforcer le sentiment d'appartenance, notamment dans la sociologie des migrations africaines. Cette étude se focalise sur les jeunes actifs à Dakar, explorant leurs
récits pour comprendre leurs expériences migratoires et les réseaux sociaux qui les soutiennent, en se basant sur des sources telles que des autobiographies et des recherches multisites. Les récits mettent en lumière les solidarités complexes entre migrants à différentes étapes de leur parcours migratoire vers l'Europe à travers les pirogues, transcendant les frontières géographiques et socioculturelles. L'étude vise à dévoiler les motivations profondes et les défis rencontrés par ces jeunes migrants, ainsi que les facteurs qui soutiennent leurs solidarités, enrichissant ainsi la compréhension de la sociologie des migrations en Afrique. En s'appuyant sur des données empiriques et des témoignages récents, elle examine également la migration féminine et les formes spécifiques de solidarité associées aux rapports sociaux de sexe.
Capabilités des migrants et changements de perspectives dans les hyper-lieux du parcours migratoire. Essai méthodologique, tiré de la comparaison des récits des migrants et des discours des acteurs de la gouvernance des migrations.
Florian Aumond
Véronique Petit
Frédéric Piantoni
Nelly Robin
Lakhdar Sais
La gouvernance des migrations révèle un "paradoxe libéral" où les intérêts économiques et les droits humains prônent l'ouverture à la mobilité internationale, tandis que les choix sécuritaires des États et les préoccupations culturelles renforcent les dispositifs de contrôle. Ce paradoxe accentue les inégalités observées sur les parcours migratoires africains. Les transferts immatériels de ressources participent à l'émergence de nouvelles perspectives, influencées par les inégalités spatiales et d'accès aux droits résultant de la gouvernance des migrations. L'étude se concentre sur les "hyper-lieux" des parcours migratoires, où tous les acteurs s'expriment. Elle confronte les récits des migrants avec ceux des acteurs de la gouvernance des migrations, mettant en lumière des perceptions divergentes qui influent sur l'expérience migratoire. Cette analyse narrative révèle la tension entre sécurité et capabilités des migrants, et ses impacts sur la santé mentale. La méthodologie propose un dialogue entre IA, SHS et droit pour comprendre les inégalités dans l'accès aux droits et à la mobilité. Elle examine les catégories émiques et étiques, révélant les transformations en migration. Le corpus comprend des textes institutionnels et des témoignages de migrants, permettant une approche diachronique sur 20 ans. Mobiliser l'interdisciplinarité vise à repenser les migrations africaines en préservant des liens de solidarité.