Les Rencontres des Études africaines en France


Retrouvez l'ensemble des ateliers proposés lors des différentes rencontres organisées par le GIS

Se faire une place. Les nouveaux espaces des migrants africains

Présentation

Coordination: Antonio Stopani

Les conditions de vie des migrants ont beaucoup changé en Italie dans les dernières 20 années. D’une part, la crise économique de 2008 a accéléré la restructuration des secteurs industriel et agro-alimentaire en réduisant l’offre d’emplois stables (formels et informels). D’autre part, les « Printemps Arabes » ont créé les conditions pour l’adoption de politiques migratoires plus restrictives et, selon les souhaits des institutions européennes, axées sur le droit d’asile. Ceux et celles qui traversent avec succès le Canal de Sicile sont désormais assignés à un système d’accueil aux procédures longues, aux typologies précaires de protection internationale et peu adéquat à rendre les éventuels bénéficiaires capables de s’insérer avec succès dans les marchés du travail et du logement. Dans cette conjoncture, la prolifération de lieux informels - bâtiments occupés dans les villes et de campements en milieu rural - a permis aux migrants de combler ces carences avec nombre de contradictions. Notre atelier sollicite des recherches ayant élu ces lieux informels comme terrain d’enquête. Il invite à dépasser les descriptions mettant en avant la ghettoïsation - imposée ou recherchée – et à penser les migrants comme étant des agents actifs dans l’économie transnationale et toujours engagés dans la trame de liens diasporiques. Il incite ainsi à étudier ces lieux comme étant connectés par des relations trans-locales, en en étudiant la complexité, et à analyser la stratification et la segmentation de la société migrante selon le temps d’arrivées, les rapports de pouvoir, les différents rôles de médiation. L’atelier propose d’interroger ces lieux au prisme de cet « autre » invisible mais omniprésent dans la vie des migrants : la famille, dont les membres sont dispersés sur au moins deux continents, en tout cas résidant dans plusieurs États, et dont les configurations diasporiques sont transformées en permanence par des nouvelles mobilités. Il appelle à explorer ces contextes dans le cadre du fonctionnement de l’économie familiale, à se demander comment s’y construisent des relations de confiance, comment s’y élaborent des ressources symboliques, comment les unes et les autres jouent dans la mise en place d’investissements et dans la construction ou la consolidation de statuts sociaux.

"Faire famille à l'ère de la migration irrégulière : pour une anthropologie des affects, des attentes, des responsabilités (Kolda, Sud du Sénégal, 2017-2022)

Alice Bellagamba

« Je l'ai fait pour la famille » est une affirmation récurrente dans les récits migratoires des personnes qui, entre 2011 et 2019, se sont aventurées sur la route de la Méditerranée centrale et sont rentrées au Sénégal par l’initiative individuelle ou grâce aux programmes de rapatriement assisté de l’Organisation Internationale des Migrations. Le soutien familial aux ambitions migratoires des jeunes est aussi évoqué par le débat public sénégalais, les responsables gouvernementaux et les organisations internationales qui participent activement aux tentatives de l’Union européenne de sédentariser les jeunes sénégalaises. Qu’est-ce que donc la famille sénégalaise ? Une analyse microscopique permet de saisir la dimension processuelle des rôles parentaux: on devient pères, mères, enfants, frères, sœurs, oncles et neveux et nièces par une quête morale et pratique constante sur les modèles parentaux et la médiation (mais aussi la navigation) des affections, des attentes et des responsabilités. S’appuyant sur des recherches menées entre 2017 et 2022 dans la région de Kolda (sud- Sénégal), cette contribution interroge la « fabrication de la famille » à l'ère des migrations « irrégulières ». En considérant les dilemmes, les drames moraux et les négociations générés au niveau familial par cette forme de mobilité géographique défavorisée, une tentative sera faite pour contribuer à la discussion sur les « nouveaux espaces « de socialité et d’interaction des migrants.

La société migrante dans une perspective locale et translocale : les Africains du district agricole de Saluzzo et leurs familles

Marco Buttino

Ce papier étudie la société migrante et ses lieux, en déplaçant l'observation du niveau local au niveau translocal/transnational. Il propose des réflexions à partir d’une région agricole avec une forte concentration de migrants et prône une ethnographie de cette société migrante à partir des diverses dates
d’arrivée et des origines : l’Italie d’abord, l’Europe de l’Est ensuite, et l’Afrique dernièrement. Les nouveaux migrants, ceux qui sont arrivés au cours des dix dernières années, sont principalement africains subsahariens et se trouvent dans des positions particulièrement marginalisées. Il est important de saisir la diversité des positions et la complexité des rapports de force au sein de cette société migrante. Le papier se concentre ensuite sur les relations morales et matérielles qui unissent les migrants à leurs familles. Le pays d’origine devient un point d’observation crucial de la migration. Quelques familles subsahariennes sont examinées, afin de faire ressortir comment la migration crée des possibilités et des ressources, transforme les liens entre les membres de la famille et modifie l’idée même de la famille et de la communauté.

Structures et métamorphoses de l'informalité. Pratiques de logement des groupes familiaux et des communautés transnationales à Borgo Mezzanone.

Edoardo Ciuffreda
Sara Tonani

Depuis plus de vingt ans, des bourgades informelles faites de cases et de cahutes construites avec des matériaux de récupération apparaissent dans les campagnes du sud de l'Italie. Notre étude porte sur un de ces lieux, la "Piste" de Mezzanone, qui peut accueillir jusqu'à 4 000 personnes pendant la saison estivale. Comme dans d'autres lieux similaires, on y trouve un espace de communication entre différents réseaux trans-locaux et transnationaux, stratifiés dans le temps. Les habitants de ces bourgades travaillent souvent à l'extérieur dans l'agriculture, mais investissent également leurs économies dans des activités à l'intérieur : locations de chambres, taxis, bars, boutiques, restaurants, coiffeurs, épiceries, transferts d'argent, et garages. Nous explorons les relations entre ces habitants, les dynamiques de formation des voisinages, et la diversité des logiques de groupements. On observe des agrégations de bâtiments (passant de cabanes en bois à des maisons en brique) habitées par des personnes revendiquant des liens familiaux. Les familles restent présentes dans la vie des migrants à travers des appels fréquents, soulignant les responsabilités et les besoins de ceux restés dans leur pays d'origine.

La société migrante dans une perspective locale et translocale : les Africains du district agricole de Saluzzo et leurs familles

Marco Buttino

Ce papier étudie la société migrante et ses lieux, en déplaçant l'observation du niveau local au niveau translocal/transnational. Il propose des réflexions à partir d’une région agricole avec une forte concentration de migrants et prône une ethnographie de cette société migrante à partir des diverses dates d’arrivée et des origines : l’Italie d’abord, l’Europe de l’Est ensuite, et l’Afrique dernièrement. Les nouveaux migrants, ceux qui sont arrivés au cours des dix dernières années, sont principalement africains subsahariens et se trouvent dans des positions particulièrement marginalisées. Il est important de saisir la diversité des positions et la complexité des rapports de force au sein de cette société migrante. Le papier se concentre ensuite sur les relations morales et matérielles qui unissent les migrants à leurs familles. Le pays d’origine devient un point d’observation crucial de la migration. Quelques familles subsahariennes sont examinées, afin de faire ressortir comment la migration crée des possibilités et des ressources, transforme les liens entre les membres de la famille et modifie l’idée même de la famille et de la communauté.

Structures et métamorphoses de l'informalité. Pratiques de logement des groupes familiaux et des communautés transnationales à Borgo Mezzanone.

Edoardo Ciuffreda
Sara Tonani

Depuis plus de vingt ans, des bourgades informelles faites de cases et de cahutes construites avec des matériaux de récupération apparaissent dans les campagnes du sud de l'Italie. Notre étude porte sur un de ces lieux, la "Piste" de Mezzanone, qui peut accueillir jusqu'à 4 000 personnes pendant la saison estivale. Comme dans d'autres lieux similaires, on y trouve un espace de communication entre différents réseaux trans-locaux et transnationaux, stratifiés dans le temps. Les habitants de ces bourgades travaillent souvent à l'extérieur dans l'agriculture, mais investissent également leurs économies dans des activités à l'intérieur : locations de chambres, taxis, bars, boutiques, restaurants, coiffeurs, épiceries, transferts d'argent, et garages. Nous explorons les relations entre ces habitants, les dynamiques de formation des voisinages, et la diversité des logiques de groupements. On observe des agrégations de bâtiments (passant de cabanes en bois à des maisons en brique) habitées par des personnes revendiquant des liens familiaux. Les familles restent présentes dans la vie des migrants à travers des appels fréquents, soulignant les responsabilités et les besoins de ceux restés dans leur pays d'origine

Logement informel et processus d'auto-organisation des travailleurs migrants.

Giovanni Cordova
Giuliana Sanò

L'étude explore le lien paradoxal entre l'informalité du logement et du travail des migrants dans le sud de l'Italie et les processus de "domestication de l'espace" ("home-making"). Les migrants, bien que marginalisés et précaires, entreprennent des actions pour créer un sentiment de chez-soi et s'ancrer dans ces territoires, souvent par des pratiques d'auto-organisation. Focalisée sur des zones agricoles comme Trapani en Sicile et Gioia Tauro en Calabre, la recherche montre comment ces processus peuvent entraîner des interactions conflictuelles entre migrants et communautés d'accueil. Les migrants utilisent des tactiques pour améliorer leurs conditions de vie et contrer les politiques institutionnelles restrictives. Ces efforts participent à la re-signification de leur présence dans les territoires où ils s'installent, malgré la tendance des institutions à naturaliser leurs conditions précaires.

"Bonjour la famille ! J'ai besoin de…". Communautés de pratique et pratiques communautaires chez les Camerounais d'Athènes.

Antonio Stopani

La Communauté Camerounaise d'Athènes, bien qu'informelle, réunit des collectifs d'immigrés camerounais selon divers critères comme le sexe ou l'ancienneté. Dans un contexte de crise sociale en Grèce et de politiques migratoires européennes strictes, ces groupes offrent des ressources précieuses que les individus auraient du mal à trouver seuls, comme des offres d'emploi, des documents ou des lieux de couchage. Le langage familier, avec des termes comme "frère" et "sœur", crée un sentiment de famille qui structure les interactions au sein de ces collectifs. Cela établit un espace de solidarité où les relations sont régies par des codes moraux familiaux. Cet imaginaire familial permet de créer des "espaces communs" pour partager des biens et des services, tout en reflétant la diversité des besoins liés aux différents stades du parcours migratoire

Retour en haut